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Rencontres en Auvergne-Rhône-Alpes 

Samedi 26 janvier 2019 

Il s’agit de poursuivre le travail engagé lors de la rencontre initiée par nos collègues de Clermont- Ferrand. Le texte de cette matinée d’échanges du 3 février 2018 avec Charles Melman est consultable sur le site de l’ALI. LA PSYCHANALYSE, QUELLE ADRESSE ? - Rencontre avec Charles Melman à Clermont-Ferrand du 3 février 2018

Pour cette matinée réservée aux membres des ALI Rhône-Alpes, Auvergne et Lyon, chacun est invité à amener ses questions, ses remarques à partir de l’argument de Jean-Louis Chassaing ci-joint.

Réflexions argumentaires par Jean-Louis Chassaing

I

Les notions de savoir, et de travail, sont redéfinies dans «l’expérience psychanalytique» (Lacan emploie souvent ce terme). De la cure à l’enseignement, mais aussi à «la cité», comment faire entendre ces spécificités, afin de laisser place, particulière au sens de symptôme, à la psychanalyse?

Y aurait-il à défendre la psychanalyse? Question inquiète, justifiée ou non, posée d’entrée de jeu. Cette question ainsi posée de façon massive fait écho à des propos entendus, énoncés de diverses manières. Elle peut être nuancée voire infléchie: comment faire entendre la psychanalyse aujourd’hui ? Cette formulation aurait le mérite de ne pas négliger la question, et de s’engager sur une voie qui ne serait pas défensive d’emblée, ni trop offensive.

Dans un texte Serge Leclaire remarque «les effets de la communication imaginaire»: «uniformisation et totalisation des masses», avec ce qui en est cause à savoir «la dérive de la fonction symbolique, l’exil de la pensée et la défaillance du concept.» Mais il ajoute qu’il ne s’agit pas de protéger voir de révérer la fonction symbolique, «coextensive de la “nature” humaine, mais de la mettre en œuvre». Serge Leclaire ( in De l’objet d’une formation sociale. Note sur le nom de rien, Revue « Io », «Le refoulement des lois», n°1, Erès, 1992) rappelle que « l’ordre symbolique est coextensif de la “ nature humaine ”, et [que] prétendre à le protéger de quelque ruine catastrophique ne peut relever que d’une sublimation exaltée de pulsions assassines très communément partagées. »

Mettre en œuvre la psychanalyse – que je n’identifie pas « au symbolique » ! Assurer sa pratique, en assurer aussi le discours, psychanalytique. En dehors de la cure s’agit-il de le tenir ce discours ? Assurer, tenir, ces termes de contrainte donnent une consistance certes mais aussi une rigidité, laquelle sied mal à une « libre association », au « laisser venir, laisser se dire ». Y-a-t-il spécificité de la place d’un analyste en dehors de la cure ? Hors de la cure, il est de bon ton de parler aujourd’hui de «psychanalyse dans la cité», n’est-ce pas plutôt, du fait de la parole et du langage, les passages d’un discours à l’autre dont il s’agit, discours psychanalytique inclus, discours au nombre de quatre selon les définitions de Lacan. Passages, mais il y a un ordre, ils tournent dans un sens. Inclus mais son effet et de remettre en question les trois autres, de pointer la place de la vérité par exemple avec la lettre qui s’y loge. Une inclusion externe ? Mais aussi l’actualité dans son rapport au langage et à l’objet, et dans son rapport au savoir, témoigne de quelques difficultés... nouvelles ? Particulières ? Charles Melman a développé ses réflexions logiques, analytiques, et continue de le faire en divers endroits (je pense récemment au site internet de l’ALI avec la question des abus et violences fait.e.s aux femmes, ou plutôt de « l’engouement formidable », médiatisé et judiciarisé, politisé, réformiste, libertaire etc., « débat » au sein duquel Charles Melman a tenu il me semble une position analytique, risquée, osée, tranchée.). Lacan évoquait ce fameux «cinquième discours» qui n’en n’est pas un, parlait du « mal de la jeunesse » ; Charles Melman a tracé aussi un discours qui régirait les toxicomanies, voire les perversions... À l’intérieur de ces particularités esquissées – d’autres esquisses sont en cours d’élaboration sans doute – comment faire entendre la psychanalyse ?

II

Nous l’avons vu et entendu, lors d’une journée de l’EPhEP à Clermont il y a deux ans, au sujet des enfants de l’immigration, les propos de Charles Melman n’ont pas été entendus, ou plutôt ont été entendus dans un sens très péjoratif. Ceci était déjà intervenu lors d’une précédente conférence de Charles Melman, «Aimons-nous encore les femmes ?», en 2007. Premier point. J’ai voulu faire entendre un second point, surprenant, celui de la rapidité de constitution d’un petit groupe – une masse ? – opposé de façon virulente et ne voulant rien entendre. Entendre

et faire entendre. Charles Melman a évoqué la question de l’adresse. C’est évidemment juste. Ma question est alors que faut-il délaisser de sa position d’analyste, et jusqu’où, pour faire entendre « la » psychanalyse ? L’adresse bien sûr, ici dans ses sens équivoques, le style aussi donc. «Le style c’est l’homme même», commence Lacan dans les «Écrits» avec Buffon. D’ajouter justement «[...] l’homme à qui l’on s’adresse.» Il y a à relire cette «Ouverture de ce recueil» d’octobre 1966.

Le style – mot issu de la racine steig-, piquer ; cf. instigation, stygma, -atos : piqure ; étiquette – est d’abord un mot juridique au XIVe, c’est la manière de procéder. Au XVe la manière de combattre ou d’agir, au XVIe la manière de s’exprimer, au XVIIe dans les beaux-arts il s’agit de la manière de traiter un sujet.

S’agit-il d’assener un savoir lacanien sur le mode du pouvoir, je sais, nouveaux «maîtres» à-venir, et / ou d’embrasser le pouvoir inflexible et captateur de l’université, sécurité oblige ? Les associations, et chaque psychanalyste pour autant, doivent-elles pour se rassurer être des sociétés savantes ? Lacan je crois se disait analysant dans ses séminaires ; il cherchait, laissait venir, piétinait et trouvait, et cherchait...

III

Mettre en œuvre. L’ouvrage suppose le travail.

C’est ainsi que j’entends la fin des conclusions de Lacan aux journées sur la transmission. Après avoir dit que la psychanalyse est intransmissible, que chaque psychanalyste soit forcé de la réinventer, il se questionne sur l’efficacité thérapeutique de la psychanalyse. Le signifiant opère car il est de l’ordre du sinthome, au même titre que le rapport sexuel, rapport intersinthomatique. «Comment communiquer le virus de ce sinthome sous la forme du signifiant» demande-t-il ? Sa réponse est : c’est ce qu’il essaie d’expliquer tout au long de ses séminaires (1978). Un travail donc, «aussi seul (qu’il) a toujours été dans (sa) relation à la cause psychanalytique». (Acte de fondation, 21 juin 1964).

Dans cet acte de fondation nous trouvons la phrase suivante, peu reprise il semble si ce n’est peut être dans des propos, pas forcément de Lacan, sur la passe : « L’enseignement de la psychanalyse ne peut se transmettre d’un sujet à l’autre que par les voies d’un transfert de travail. Les « séminaires », y compris notre cours des Hautes Études, ne fonderont rien, s’ils ne renvoient à ce transfert.

Aucun appareil doctrinal, et notamment le nôtre, si propice qu’il puisse être à la direction du travail, ne peut préjuger des conclusions qui en seront le reste » (Note adjointe). Ceci sous le titre « De l’École comme expérience inaugurale » ! Ce texte de fondation, associé à la proposition de 1967, précise s’il en est le travail, le savoir et le transfert puisque ce dernier relève du précédent. Le transfert de travail se substitue-t-il au transfert ? En est-il dépendant ? Stimulé ? Indépendant ? Il semble à lire Lacan que chaque un ait à s’y mettre. Ce qui n’exclut ni École ni les autres.

 


 

 

 

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