L'école des traîtres
Le fondateur d'une religion peut savoir qu'il aura deux sortes de disciples : les fidèles et les hérétiques. Le fidèle jouit de la castration offerte, tandis que l'hérétique préfère la jouissance narcissique sans limite que permet l'opposition.
Le fondateur de la psychanalyse en revanche a dû s'étonner qu'une discipline susceptible de permettre de s'affranchir de la religion suscite néanmoins autant de traîtres que de fidèles.
L'option de l'hérétique est intellectuellement fondée. Celle du traître l'est moralement, à partir d'un baffouillage quelconque.
Lacan est sans doute le champion en nombre de traîtres que peut susciter un génial créateur, je les ai bien connus, c'étaient des amis.
Partis en revendiquant la liberté de penser, ils n'ont rien pensé du tout, sinon le ressentiment à l'égard de celui qui n'a pas cessé de hanter une cogitation en peine pour le réfuter. Un ami des plus chers a ainsi orchestré une traduction complète des œuvres de Freud, répulsive. Elle se voulait d'une fidélité absolue, contre la lecture libre qu'en donnait Lacan.
Démonstration a contrario que la fidélité voulue absolue est une autre façon de trahir, c'est-à-dire effacer qu'il y a un sujet à l'œuvre dans le texte, et qu'il s'agit de le déchiffrer.
Voilà bien un thème de travail : à quoi reconnaît-on l'élève, une fois qu'il est affranchi de la redite, de l'hérésie ou de la trahison ?
Ch. Melman - 30 mars 2018
A ESCOLA DOS TRAIDORES - Η ΣΧΟΛΉ ΤΩΝ ΠΡΟΔΟΤΏΝ - LA SCUOLA DEI TRADITORI