CHARLES MELMAN (1931-2022)
CHARLES MELMAN (1931-2022)
« Il entendait !»
La disparition de Charles Melman marque incontestablement la fin d’une période. Il laisse bien sûr un enseignement remarquable exceptionnel dont nous pouvons en grande partie disposer grâce aux courageuses et sérieuses re transcriptions de l’ALI. Toutefois cet enseignement vivant était, est marqué par une énonciation qui alliait une grande rigueur et une facilité à délivrer le plus souvent avec clarté des énoncés fondamentaux. Il ne craignait pas d’aller également vers quelque nouveauté, en se basant sur les énoncés de Lacan mais sans aucunement les répéter, les reproduire ou alors à sa façon à lui, toujours innovante. Cela (ce la ?) n’est pas « permis » à quiconque ! C’était une aide précieuse. S’appuyer sur l’enseignement de Lacan pour un dire singulier, au dit ici marqué par le désir de transmettre, mot qu’il appréciait peu alors qu’il l’a, notamment ces derniers temps, tellement prononcé ! Il y a quelques années tandis qu’il me conduisait dans sa voiture au siège de l’ALI je me souviens d’une conversation essentiellement marquée par son inquiétude pour le devenir de la psychanalyse, et il citait toujours « les marchands » de la précieuse discipline.
Charles Melman était stimulant, terriblement stimulant. Et à l’écoute, vraiment ! Ce fut avec un ou deux autres psychanalystes le seul, et sa position était toujours originale et inventive, avec lequel je pouvais dans les années 1980 parler des toxicomanies. C’est lui qui suggéra le titre du recueil « Écrits psychanalytiques classiques sur les toxicomanies » en 1998. « C’est un livre qui fera date » encourageait-il. Mais est-il encore tenu compte aujourd’hui du « passé » ? Il encourageait toujours au travail, avec acharnement et parfois (souvent ?) avec une insatisfaction à la fois réelle et stratégique !
Je devais le revoir en novembre, je lui téléphonais pour cela, pour prendre rendez-vous. Ce fut « toujours avec plaisir », mais la dernière conversation, celle-là, eu donc lieu par téléphone, passionnante et touchante comme …toujours. Toujours fort accueillant.
Enseignement, transmission, formation. J’oubliais : institution, là où se joueraient les trois premiers, plus sa propre analyse personnelle, et quelques autres « qualités », celles avec lesquelles « on » s’autorise » ! Charles Melman a toujours de longue date souhaité un contre-poids à un bureau. Sa dernière contribution témoigne également de sa préoccupation quant à l’institution.
Mille merci, et respect, Monsieur Charles Melman, pour ces appuis singuliers durant ces 40 années, et pour celles qui vont suivre, avec ceux-là et autrement.
Jean-Louis Chassaing