Avant de commencer notre après-midi de travail, je souhaitais vous raconter une anecdote à propos de Rozenn Le Duault, l’une des fondatrices de notre Cercle, qui n’a malheureusement pas pu être présente aujourd’hui.
Lorsque je lui ai parlé du thème de notre journée : Tant qu’il y aura des hommes ? elle a immédiatement réagi avec l’énergie qu’on lui connaît. Elle a eu très vite le désir de préparer une intervention, mais son emploi du temps ne lui a pas permis d’être parmi nous.
Malgré cela, j’ai insisté : j’étais convaincu qu’elle aurait eu quelque chose d’intéressant à partager. Elle m’a alors proposé un titre, qui en soi constitue déjà une lecture originale du thème. Elle l’avait intitulé : Tant que les hommes grimperont sur les arbres !
Après cette petite parenthèse, et avant de vous parler de l’organisation de notre après-midi, je voudrais dire quelques mots pour nous faire rentrer dans l’esprit de cette journée.
La formule « Tant qu’il y aura des hommes ? », peut être entendue comme : que reste-t-il de l’homme lorsque la virilité et la position phallique, vacille ? Notamment dans la vieillesse, moment où l’homme est confronté à la chute de ses identifications liées à la puissance et la sexualité. Ce moment est un tournant subjectif important dans la vie.
A savoir que le phallus est avant tout un signifiant, et non un simple organe. Chez l’homme, la position phallique est souvent le support d’une certaine image de soi : maîtrise, virilité, pouvoir de séduction. Tant qu’il y a du désir, le sujet peut se maintenir, se soutenir dans cette position.
Mais, au cours de la vie, lors de la vieillesse opère un effondrement progressif de la position phallique : déclin corporel, perte de puissance sexuelle, désinvestissement social. Ce moment met le sujet face à la castration, comme une expérience réelle du manque. L’homme âgé, confronté à la perte de sa position virile, peut alors céder sur son désir.
Si le sujet parvient à traverser le fantasme, de ne plus se soutenir de l’image virile alors il peut accéder à un désir moins aliéné, plus en accord avec le réel, qui lui fasse sentir exister, reconnu, désirable Ce moment peut être une forme de sagesse, voire d’éthique du désir, dégagée du semblant.
« Tant qu’il y aura des hommes ? » — la question reste ouverte, comme interrogation sur ce qui persiste du sujet au-delà de la position phallique. La vieillesse, loin d’être une chute pure, peut être l’occasion d’un retournement subjectif, d’un accès à un désir autre. Ce n’est plus l’homme dans sa puissance qui se maintient, mais le sujet, parlant, désirant encore tant qu’il consent à s’alléger de ses identifications.