Journées de l'ALI : L'enfant entre désir et jouissance"
01 avril 2006

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RENAUT Alain,WEISS Danièle,LEBRUN Jean-Pierre



Les journées de l’ALI organisées par l’EPEP sur la psychanalyse des enfants "entre désir et jouissance" témoignent de la mise à l’épreuve de nos outils théoriques et de leur pertinence. Elles cherchent à entretenir la vigilance du psychanalyste à l’égard de ce que lui enseigne la clinique.

Les engagements cliniques prudents, rigoureux ont permis de repérer sous quelles conditions l’enfant peut s’inscrire, ou non, dans le discours qui lui préexiste, que ce soit le temps initial de la constitution de sa subjectivité, que ce soit des temps d’une démarche thérapeutique dans un cadre singulier ou dans un cadre institutionnel.

On a pu y repérer :

  • la nécessité que soit tempérée la jouissance de la mère, pour que l’enfant puisse y crocheter sa subjectivité (Marie-Christine Laznik),
  • comment un discours et une jouissance familiale orientés vers la recherche du bonheur à tout prix bloquent l’émergence de toute subjectivité de l’enfant autrement que dans des actes délictueux (Paula Cacciali), ou des mises en scènes (Corine Tyszler),
  • les difficultés de l’enfant moderne à saisir sa place quand il est l’objet élu d’un parent, à l’exclusion de tout autre (Rubin Marmursztejn),
  • les conditions qui génèrent que l’enfant soit un objet de marché, de maltraitance, voire de perversion (Hervé Bentata),
  • le dénuement des enfants sans recours symbolique dans le rapport au réel, dans une situation de psychose sociale (Alain Vanier).

Tout cela rend difficile à l’enfant la constitution d’un fantasme. En réponse, le psychanalyste tente d’introduire l’écart qui va de la jouissance et de l’envie, au désir qui ménage la prise en compte d’un impossible.

Le psychanalyste y va de sa structure subjective, dans ce que la parole sert de cadre à la jouissance (Dominique Janin) et il se propose à l’enfant comme un interlocuteur qui lui permette de structurer un symptôme (Christian Rey, Sandrine Calmettes-Jean).

La prise en compte des parents peut se faire en référence à leurs propres désirs, à leurs positions d’homme et de femme (Colette Brini).

Il s’agit parfois de mobiliser la structure de soins pour tenter de la décompléter (Catherine Mathelin) quand elle constitue le corps familial de l’enfant.

Il peut s’agir de structurer un tissu de relations qui puisse ménager une différence au sein d’une coordination de soins, pour que l’enfant se dégage de la position d’être l’objet de l’Autre (Christian Dubois).

La position du psychanalyste est à l’épreuve dans la singularité d’une cure (Alain Harly), dans le rapport aux parents, fût-ce une absence de famille (Jean Périn), dans les instance sociales comme l’école (Doris Peronny) où les mesures de prévention de tous ordres étouffent l’émergence de la subjectivité, dans les difficultés d’inscriptions de l’enfant dans la lettre (Odile Fombonne), dans les rapports au monde des perversions ordinaires de la vie sociale dont témoignent les variantes du discours courant (Annick Périn) ou l’incidence des médias et de leurs écrans (Jean-Marie Forget).

Les outils que S. Freud a initié, auxquels J. Lacan a apporté un large développement méritent d’être remis au travail dans un temps logique où il s’agit plus de favoriser la constitution d’un symptôme que le sujet puisse s’approprier, que de dévoiler une interprétation. La manière magistrale, mais aussi prudente et avisée dont Jean Bergès proposait son enseignement, notamment sur le corps de l’enfant (Marika Bergès-Bounes), engage à une clinique qui nous enseigne dans un perpétuel renouvellement.

Ces journées ont permis de relever les convergences de perspectives à partir de questions cliniques différentes, elles ont permis à travers cette diversité de saisir la nécessité de décentrements successifs pour être au plus près du réel qui se manifeste ainsi, et de mettre à l’épreuve nos outils théoriques. Elles donneront lieu à une publication pour en rendre compte au plus vite. Plusieurs champs de travail s’en sont dégagés pour explorer les leviers permettant la mise en jeu de l’inconscient de l’enfant. Nous nous efforcerons de les approfondir dans un travail à venir.