Argument du JFPn°56 : Difficile altérité, adolescents d’aujourd’hui
28 mai 2025

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Stéphane THIBIERGE
Notes de lecture

 

Devenir Autre, c’est le destin de l’adolescent, pour elle comme pour lui.

 

Destin, puisque le réel qu’il rencontre – le sexe – n’est aménagé par aucune nature, mais relève ici du langage, et du manque d’une référence.

 

Traditionnellement une culture bordait cette faille de quelques traits imaginaires et symboliques, à partir desquels se jouait pour chacun le sort de la rencontre. La nôtre se distingue de laisser la faille béante, voire de la creuser encore au galop de discours (technique, scientifique, économique) qui ne veulent rien savoir de l’énigme sexuelle.

 

D’où sans doute le désarroi de beaucoup d’ados aujourd’hui, rencontrant la féminisation propre à tout parlêtre dans l’abord du sexe, sans avoir toujours de quoi l’assumer en destin singulier. L’offre généralisée d’addictions de toutes sortes peut ici nourrir l’espoir d’anesthésier cette faille.

 

Une autre réponse contemporaine à cette difficile altérité, c’est la positivation univoque de l’imaginaire phallique, valant comme défense identitaire au titre d’une « norme-mâle ».

 

« L’Un pour l’Autre », c’est certes l’inversion que commande pour chacun la mise en place d’une image spéculaire. Les adolescents nous en rappellent pourtant l’illusion et l’étrangeté, quand la seule norme du parlêtre tient à ce qu’il éprouve de l’altérité du sexe, et donc d’une commune féminisation initiale. Ajoutons que pour les ados d’aujourd’hui, les versions contemporaines de cet Un imaginaire laissent souvent les unes sur le bas-côté, et vouent les autres à la bêtise identitaire.

 

Raisons qui nous ont paru justifier le deuxième tour de ce numéro.

 

Stéphane Thibierge