Denise Vincent aura tenu jusqu’au bout la barre de ce petit navire qu’est le site internet de l’Association lacanienne internationale. Elle anima son comité de rédaction de toute son intelligence, de tout son esprit critique empreint d’humour et de perspicacité, par-delà les inévitables tangages institutionnels. Elle avait été l’initiatrice des « dossiers » dont la finalité est de rendre accessible la psychanalyse à l’étudiant aussi bien qu’à l’honnête homme de notre temps. Elle aura aussi beaucoup fait pour que a-l-i.org/freud soit un site d’analystes à l’écoute des évolutions du lien social, en œuvrant tout au long de ces années à la publication de billets en prise avec le vif du sujet. Ces billets, elle les jugeait tellement essentiels à côté des articles, qu’elle avait tenu à ce qu’ils figurent sur une colonne à part dans la page d’accueil, pour que les internautes puissent venir y lire dans le meilleur des cas une interprétation de psychanalyste articulée à l’actualité culturelle, sociale et politique. Ses propres contributions furent savoureuses tant par leur justesse que par la qualité et la vivacité de leur style.
Elle estimait que le site devait être également le lieu à partir duquel la production théorique et clinique de l’Association pouvait être diffusée au niveau international. Cette intuition se vérifie encore chaque fois que nous prenons acte du nombre sans cesse croissant de visiteurs qui de Rio à Rabat consultent notre site, assurant à l’Association un véritable rayonnement dans le monde. C’est pourquoi elle était particulièrement attentive à la qualité des articles, exigeant qu’ils soient bien écrits, accessibles et d’une lecture aisée. Denise Vincent considérait, en effet, qu’internet était le média privilégié par lequel l’Association ferait connaître ses travaux dans l’espace public. Elle avait donc une approche, visionnaire, le mot n’est pas trop fort, de ce média et elle avait l’âge de ses audaces : sa jeunesse nous épatait. En témoignait sa capacité à accueillir les conseils, les objections et les critiques sans concessions au cours de comités de rédaction qui ne ronronnaient jamais et qu’elle ne laissait pas dormir. Elle ne cherchait pas à obtenir de ses participants un consensus mou, mais à entendre de chacun une parole qui soit un dire. Sa générosité et sa bienveillance faisaient de nos réunions mensuelles de vrais moments d’humour et travail. Denise était une amie, une grande dame et une analyste dans la Cité. Son absence nous pèse déjà et dans le sillage de notre embarcation nous reconnaissons son empreinte.