L’Association lacanienne internationale, reconnue d’utilité publique, a pour but la transmission de la psychanalyse et la formation des psychanalystes, selon les termes de l’article 1 de ses statuts.
À cette fin, elle tient compte des préoccupations, des questions ou des idées qui font débat dans la société contemporaine.
Pour prendre en compte les questions récurrentes aujourd’hui touchant les abus éventuels d’autorité ou d’influence à des fins de séduction ou d’emprise, l’ALI a souhaité mettre en place un Cartel de veille sur les pratiques composé d’un certain nombre de ses membres qu’elle estime suffisamment qualifiés et expérimentés à cette fin, et dont on trouvera la liste ci-après.
Ce groupe de travail est chargé à la fois d’approfondir ces questions contemporaines du point de vue de la psychanalyse, et d’accueillir les demandes ou témoignages de quiconque souhaiterait s’exprimer à ce sujet en relation avec l’association ou tel de ses membres.
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Il convient de rappeler ici que la psychanalyse comme pratique, de par sa visée et sa méthode, a particulièrement à connaître des relations de désir, d’amour ou d’emprise dans lesquelles se trouve pris tout sujet humain, du simple fait qu’il est appelé à parler, et qu’il est pris dès avant sa naissance dans les contraintes et les nécessités de la parole.
La visée de la psychanalyse est de faire accéder qui le souhaite à la connaissance de ces contraintes et de ces nécessités, en découvrant à la faveur de la cure comment son désir est lié au désir de l’autre, notamment parental, par qui il est venu à la parole et aux tout premiers échanges. Freud a montré, ce que confirme facilement l’observation des tout-petits, que la sexualité avait toute sa place dans ces premiers échanges.
La méthode de la psychanalyse consiste à donner à qui le souhaite la possibilité de parler, et cela non pas une fois, mais de façon répétable, suffisamment pour que se découvrent au sujet, au cours de la cure, les figures de cet autre auquel son désir est lié depuis l’enfance, et dont bien souvent il recherche à ce titre l’amour.
Très tôt, la psychanalyse a découvert que la relation de parole qu’elle rend possible provoque le phénomène nommé par Freud le transfert, par quoi la personne de l’analyste se trouve régulièrement devenir le symbole et l’image effectifs de ces premières relations de désir, d’amour, voire d’emprise.
Le but de l’analyse est de s’appuyer sur le transfert pour permettre au patient d’en identifier les causes, et dénouer par là les contraintes et les nécessités où est pris son désir.
Mais l’on comprend que le transfert, par l’amour qu’il suscite, puisse évoquer aussi la figure du désir, sexuel aussi bien, et placer l’analyste et le patient, quoique de manière différente, devant l’évidence d’une actualité effective de ce désir.
C’est pourquoi Freud a pu énoncer la règle dite d’abstinence : à savoir que l’analyse ne peut se réaliser qu’à la condition que l’analyste ne se rende pas à l’amour ou au désir appelés par son patient dans le cours de la cure. Qu’il le fasse rend caduque la relation psychanalytique, et conduit l’analyste et le patient à assumer dès lors comme ils le peuvent et de manière singulière l’un et l’autre leur rapport à ce désir en acte.
Ce bref rappel des conditions de la cure psychanalytique souhaite seulement :
– relever le fait du transfert, et l’ambiguïté inévitable de sa relation au désir ;
– rappeler la responsabilité du psychanalyste à cet égard, en tant qu’il veille aux conditions de la conduite de la cure.
Ces conditions ne sont pas intangibles pour autant.
Leur interruption éventuelle fait passer à autre chose, et engage autrementet d’une façon chaque fois singulière la responsabilité et le désir de l’analyste et de l’analysant.
Ce sont ces questions, et les situations qu’elles peuvent entraîner et dont il aurait à connaître, que ce cartel de veille sur les pratiques se propose de mettre au travail, dans le respect des principes éthiques de la psychanalyse, et l’attention portée à chaque situation singulière qui pourrait lui être soumise.