Dans la première version de sa proposition sur la passe, en septembre 1967, Lacan note que le terme de liquidation du transfert fait porter sur le seul psychanalysant la responsabilité de l’effectuation de la fin de la cure.
Ainsi, lorsque la résolution du transfert ne se produit pas, que l’analyse vire à l’analyse sans fin, la faute en est attribuée au patient, alors que c’est plutôt au psychanalyste de rendre possible la fin de la cure en acceptant de perdre l’agalma, l’objet précieux qu’il incarne, moteur du transfert et soutien du sujet supposé savoir.
Dans ce temps qui est celui de la fin de cure, le psychanalyste peut tarder à accepter de perdre cet objet séparateur, ou à l’inverse, ébloui comme Alcibiade devant Socrate, le reporter sur le psychanalysant qui devient dès lors celui qui est aimé et désiré.
Dans le premier cas, l’analyse devient interminable et ce d’autant plus que, comme le souligne Lacan, l’analysant :
… au terme de la relation du transfert, soit : quand le désir s’étant résolu qui a soutenu dans son opération le psychanalysant, il n’a plus envie à la fin d’en lever l’option, c’est-à-dire le reste qui comme déterminant sa division, le fait déchoir de son fantasme et le destitue comme sujet.
Les deux partenaires reportent dès lors la fin de la cure sine die. Le psychanalyste parce qu’il n’accepte pas de perdre l’agalma et le désêtre qu’une telle perte implique ; le psychanalysant, dans la mesure où ce positionnement de l’analyste rend difficile la séparation nécessaire et vient redoubler le maintien de son fantasme dont il ne veut pas déchoir.
Dans le second cas, lorsque l’analysant est paré par l’analyste de l’agalma, la séparation de la fin de la cure a eu lieu, le sujet aperçoit bien dans un flash l’exercice possible d’un désir autre que celui soutenu exclusivement par son fantasme, mais il est difficile de prévoir ce qu’il advient de ce mouvement de bascule. Ce n’est qu’au cas par cas que peut s’apprécier la nature de la nouvelle relation qui s’institue entre les deux partenaires, sans qu’il soit possible d’exclure la mise en place d’un lien d’amour et de désir durable. Un tel dénouement marque-t-il l’échec de la cure ? Et si oui, en quoi se distingue-t-il de celui d’une relation analytique qui tourne court en raison de l’émergence trop précoce d’une relation de désir réciproque ? Quelles sont les autres modalités de la relation entre l’ex-analysant et le psychanalyste ? Les témoignages sur ce moment de bascule sont pour le moins rares. Le cartel de veille sur les pratiques pourrait-il en recenser d’autres, autant de la part d’analystes que d’anciens analysants ?