Colloque de Fez – novembre 2008 => consultez le dossier
La structure qui a regroupé le plus grand nombre d’étrangers résistants pendant la guerre (1) est la M-O-I (la main d’oeuvre immigrée), divisée en groupes linguistiques et créée par le Parti communiste. A l’origine, en 1926, appelé, M-O-E (la main d’oeuvre étrangère), on est passé du signifiant : étranger à celui d’immigré, jugé moins stigmatisant.
Ces étrangers : qui sont-ils ?
Dans les années 1930, la France est le pays en Europe qui compte la plus grande proportion d’étrangers. La plupart sont des immigrés économiques (Espagnols, Italiens, Polonais), mais un grand nombre aussi sont venus pour d’autres raisons : des juifs d’Europe centrale chassés par l’antisémitisme, et des réfugiés politiques contraints à l’exil, face à des gouvernements autoritaires. Citons : Hongrois en 1919, Italiens en 1922, Allemands en 1933, Polonais entre 1926 et 1934, Espagnols républicains en 1939, etc… Parmi ces réfugiés, des communistes. Ils vont constituer la première génération, les cadres politiques de l’organisation. Ceux qui ont été élevés dans la société traditionnelle juive ont fait une conversion vers le socialisme. Boris Holban (patronyme : Bruhman) en Roumanie, Gronowski et Aron Skrobek en Pologne, soupçonnés d’être des communistes, ont été incarcérés dans leur pays par les dictateurs au pouvoir. Leur connaissance des moyens répressifs de ces gouvernements sera utile dans la Résistance. Arrivée à Paris en 1936, Aron Skrobek(pseudonyme : David Kutner) est un des rédacteurs du journal : La Naïe Press, journal de liaison en yiddish qui aura un rôle important d’information pour la communauté juive menacée .
Pour tous ces immigrés, la France est le pays des droits de l’homme, de la Révolution, des juifs devenus citoyens, et le pays où une loi punit les incitations à la haine contre l’étranger.
Les immigrés juifs des pays de l’Est s’installent dans les quartiers populaires de Paris: Belleville, le Marais. Leurs enfants se retrouvent à l’école, dans les patronages, dans les colonies de vacances. Les amitiés se nouent. Les patronages laïcs serviront de recrutement pour la Résistance. A l’école, ils sont décalés de l’assise symbolique de leurs parents car dans certaines familles, on ne parle que yiddish. Des activités culturelles sont organisées par leurs parents, notamment du théâtre yiddish et organisations sportives : le Yask.
La participation aux grandes manifestations du Front populaire fera également le socle de la culture politique de la deuxième génération où l’idéologie de la lutte des classes affronte celle des nationalistes.
La guerre civile espagnole sera un premier terrain d’affrontement entre différents courants idéologiques en France : pacifiste, nationaliste, international socialiste.
De nombreux militants de la M-O-I se portèrent volontaires au secours des républicains espagnols en 1936. Quand les brigadistes internationaux sont contraints de quitter l’Espagne, après la défaite des républicains, la plupart ne pouvant rentrer dans leur pays demeurent en France, dont un bon nombre de républicains espagnols. Ces étrangers sont internés dans des camps (Argelès, Bacarés), car on se méfie de leurs activismes.
Quand la guerre éclate, plus de 100 000 étrangers s’engagent comme volontaires. La voie royale de l’intégration passe par le sang versé en paiement de la dette pour le pays accueillant.
Holban (2), fait prisonnier au moment de l’armistice en juin 1940, réussira à s’évader et organisera sous les ordres d’un Espagnol – Courado Miret- les premières brigades spéciales de sabotage en 1941. Il prendra la direction militaire de la FTP-MOI à Paris (les francs-tireurs-partisans de la M-O-I) en 1942.
Pour accueillir les réfugiés juifs de l’Est fuyant le Nazisme: Une organisation, solidarité est constituée dés 1939, pour remplacer la section juive de la M-O-I, devenue illégale comme le parti communiste. Elle est chargée de la protection des passages clandestins et de leur fournir des faux papiers. Cette organisation publie aussi les journaux et organise des manifestations culturelles destinées à maintenir du lien social. En 1942, solidarité décide de créer des organisations de masse pour entraîner le plus grand nombre de juifs à lutter pour la libération et détruire le nazisme. Il s’agit de : l’UJRE, (Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide), organisation mère, de l’UJJ (Union de la Jeunesse Juive), l’UFJRE (Union des Femmes juives pour la Résistance), cette dernière organisation pour inciter les femmes à entrer dans la résistance et s’occuper du sauvetage des enfants.
Le pacte germano-soviétique de 1939 a semé le trouble. Pour certains communistes, cette guerre est une guerre impérialiste qui ne les concerne pas. D’autres comme Adam Rayski soulignent le grave danger qui menace toute la population juive.
Le gouvernement de Vichy : La France est divisée en deux ; la zone occupée au nord et la zone libre, au sud.
Pour Pétain et Laval, la défaite de 1940 s’explique non par des raisons militaires, mais par le pourrissement de la société française depuis la Révolution et par le complot judéo-bolchévique anti-Français.
Il s’agit donc de régénérer la France, en excluant les impuretés que sont les juifs et les étrangers, et rassembler les Français autour des 3 mots : Travail, Famille, Patrie (remplaçant : Liberté, Egalité, Fraternité).
Une loi du 22/07 1940 remet en cause les naturalisations acquises depuis 1927. Puis la loi sur le statut des juifs (3-10-40) est promulguée. (Cette loi n’a pas été demandée par les nazis !).
Cette loi désigne qui est juif en France ainsi que les activités dont ils sont exclus. Surprise des Français d’ascendance israélite, dont les parents et grands parents ont choisit l’assimilation, pour lesquels, le judaïsme n’est qu’une religion, et qui soudain se trouvent considérés comme étrangers, bien que l’affaire Stavisky ait soulevé à nouveau en 1934 un relent d’antisémitisme refoulé.
Marc Bloch (3) écrit : "Nous sommes français ; Nous n’imaginons pas que nous puissions cesser de l’être". Un certain nombre d’israélites ne comprennent pas que l’on puisse les amalgamer avec les juifs d’Europe centrale "qui ont un fort accent et nous font du tord"…
Hanna Kamieniecki (4) dont les parents polonais immigrés fréquentent le milieu sioniste de gauche n’a qu’une vague notion de sa judéité et se dit moins juive que les juives françaises. Le Sionisme est aussi dans cette période une forme politique de la "sortie du religieux" (selon la définition que donne M.Gauchet) pour les juifs d’Europe.
La Loi du 4-10-40 stipule "Les ressortissants étrangers de race juive pourront être internés dans des camps spéciaux.." Le mot race intervient pour la première fois. Plus tard, Vichy désignera sous le signifiant "indésirables" les étrangers et les juifs résistants pour gommer leur action politique : "Un vent mauvais s’est levé sur la France", dit le Maréchal. "Ne laissez plus faire de mal à la France…", "N’écoutez pas les vendus bolcheviques." La propagande de Vichy dénonce constamment les étrangers par des affiches, des films, des discours, la presse….
Vichy, qui a demandé aux juifs de se déclarer comme juifs, (un certain nombre d’entre eux iront s’inscrire en disant qu’ils n’ont pas honte d’être juifs), ordonne leur rassemblement dans une organisation : L’UGIF (loi du 2-12-41) (Union générale des israélites de France). Les allemands ont créé des institutions semblables dans tous les pays d’Europe. Max Weinstein "Il y avait à Lyon, un bureau de l’UGIF, dont les fichiers ont servis aux nazis pour les rafles et que nous UJJ sommes allés détruire." Considérée comme collaboratrice par les militants, Hanna parle des juifs qui en ont fait partie, comme des juifs "bruns" qui pensaient s’en sortir en obéissant à Vichy, alors que la plupart d’entre eux ont été déportés.
Mai 1941 : Les ressortissants étrangers sont convoqués et internés à Pithiviers. 40 % des immigrés se dérobent, c’est le début de la résistance, encouragée par l’internationale socialiste, au moment où Hitler entre en URSS et où la "solution finale" est décidée. Gronowski, Kaminski, Arthur London, après la rupture du pacte germano-soviétique en 1941, réorganisent la structure de la M-O-I en groupe linguistique et sont nommés responsables de la pyramide par la direction du Parti communiste, tandis que J.Epstein (5) est chargé du comité militaire interrégional.
Vichy pourchasse les militants de la M-O-I : Un certain nombre d’entre eux seront arrêtés et exécutés. Le 15 décembre 1941 : 95 otages sont fusillés au Mont Valérien dont des juifs étrangers et des résistants communistes. Parmi ces derniers : Gabriel Péri et Lucien Sampaix.
Le recrutement des résistants s’intensifie alors par l’intermédiaire des mouvements sportifs et des auberges de jeunesse. Un numéro de 2004 de La presse Nouvelle un mensuel de l’UJRE, compare l’intensification du mouvement résistant à la révolte des Macchabées en Judée contre Antioche.
En mai 1942, par le port de l’étoile jaune et les mesures restrictives de déplacement, les interdictions dans la vie quotidienne : On devient juif à temps plein.
La rafle du Vél’d’Hiv en juillet 1942 accélère la prise de conscience. Les crimes nazis et l’extermination des Juifs dans les camps sont dénoncés dans un tract diffusé par le Parti communiste qui déclare que le salut et la survie individuels passent par l’engagement dans la Résistance. Des jeunes juifs qui ont vu leurs voisins ou leurs parents arrêtés vont gonfler les rangs de la Résistance. S’engager dans la Résistance pour venger sa famille ou des camarades est une réparation. Dans un tract, on peut lire ceci "fermer les yeux devant la réalité tragique équivaut à un suicide." Les jeunes femmes vont aussi s’engager et prendront beaucoup de risques en transportant des armes dans des paniers ou des poussettes d’enfants.
Hanna rencontre par hasard une camarade de classe qui lui parle de la Résistance : "j’ai vécu cela comme une bouée de sauvetage, une bénédiction. J’avais envie de faire quelque chose, de lutter, j’avais envie d’aider les juifs à partir en Israël." Lors de sa première rencontre avec Henri Krasucki chargé du recrutement de la jeunesse, elle lui dit : "je suis sioniste", il répond : "Quand on aura fait la révolution, il n’y aura plus de problème juif…"
Pour Hanna, c’est le début d’une nouvelle socialité. Après un temps de formation, elle participe au triangle d’action, où chacun adopte un surnom sans connaître les autres membres de la pyramide organisationnelle. Elle limite son rapport aux autres non résistants car il faut cacher cette appartenance.
Elle poursuit : "J’accompagnais mon père dans les grandes manifestations du front populaire… Mais La révolution n’avait pas beaucoup de sens pour moi, à cette époque j’avais d’autres préoccupations en 42… j’étais contente d’être dans un groupe de jeunes et le côté clandestin, ajoutait une pointe ludique à l’action. Je distribuais des tracts ou collais des affiches. J’avais l’impression d’être utile, d’exister…"
Pour ces jeunes : la collectivité, la solidarité, c’est ce qui aide à survivre. Certains parmi eux, ont peu de formation politique, quand ils font le choix de la résistance. Max Weinstein (6), est à Lyon : son frère lui propose de faire partie d’un groupe de résistance "J’étais ignorant des choses de la politique, j’étais imprégné de l’ambiance générale : le communiste, c’est l’homme au couteau entre les dents ! Je voulais faire quelque chose… J’ai répondu oui, pas très assuré."
Les jeunes retrouvent une famille dans la Résistance. Celle-ci donne du sens alors que la persécution de leur famille est dénuée de sens.
L’idéologie des résistants communistes :
Pour les communistes, un seul pays sans racisme : l’URSS, une seule solution : la révolution. La persécution antijuive s’inscrit dans la lutte des classes (le grand capital contre le petit commerce) et l’alliance des prolétaires de tous les pays se fait sans distinction de race ni de nationalité. L’antisémitisme est dénoncé par le PC comme divisant les travailleurs. Quand le socialisme triomphera, il n’y aura plus d’oppression.
Les militants se réclament des valeurs de la Révolution française de 1789, de la Commune de Paris de 1871, de la révolution d’Octobre. Leur certitude, c’est que la victoire des forces contre le fascisme est liée à l’histoire et que l’issue sera le triomphe du socialisme et du progrès de la société… La libération du territoire et des hommes s’accompagnera d’une libération des contraintes d’un régime inhumain : le capitalisme. C’est l’action directe qui doit accélérer le cours des événements. Révolution et résistance sont liées.
Le sentiment de fraternité a joué un rôle déterminant chez les militants de la M-O-I en leur donnant l’énergie nécessaire pour lutter. Des phénomènes d’identification entre eux et avec leurs responsables ont permis de développer une conscience collective de combattants.
En 1943, les combats et l’action directe s’intensifient de la part des FTP-MOI : une équipe spéciale de sabotage est constituée à Paris avec notamment : Alfonso, Marcel Rayman, Fontano, équipe qui s’ajoute aux quatre équipes militaires déjà existantes. Plusieurs attentats contre des dignitaires nazis seront organisées jusqu’à l’arrestation de 68 membres des FTP-MOI de Paris, faisant suite déjà à un grand nombre d’arrestation de l’organisation politique et militaire juive. En tout : 196 militants sont arrêtés suite à trois filatures menées par les brigades spéciales de la police.
La première traque est celle de la jeunesse juive – Paulette Sliwka sera arrêtée et déportée (7)- traque qui fait suite à une confidence sur l’oreiller de "La Rouquine". La dernière filature va donner lieu à une propagande intense de Vichy, connue sous le titre : l’Affiche rouge, arrestation qui fait suite à une traque très serrée de la police, des négligences de sécurité de la part du groupe et une dénonciation sous la torture d’un militant. Des polémiques s’engagent au sujet des causes de ce vaste coup de filet de la police. Certains historiens (8) dénoncent un lâchage de la direction du PCF qui aurait maintenu ses troupes, malgré l’intensification de la traque. Cette thèse est invalidée par Holban (9). Par ailleurs, celui-ci, perçu comme responsable de cette tragédie se défend "Manouchian – qui l’a remplacé pendant les faits – aurait commis des imprudences. Il existe un mythe Manouchian."
Les personnes interrogées en entretien ont souligné l’importance du Parti communiste dans la Résistance : L’action directe était la seule solution pour chasser l’occupant.
Dans cette période de la fin de l’année 1943 et des premiers mois de 1944, le Parti communiste souhaite faire front unique avec De Gaulle et tous les résistants, pour préparer l’après-guerre et l’unité de la résistance française. L.Rochman dans "La belle âge" écrit : "S’ils s’étaient appelés : Martin ou Durand, mais ils s’appelaient : Grzywacz, Wajsbrot… c’était imprononçable… Les résistants devaient être de bons Français de souche".
L’affiche rouge : Un objet de mémoire
L’affiche rouge avec le visage des résistants et leurs noms, envahit les murs de Paris portant la mention de "terroristes étrangers". Un procès s’ouvre en février 1944, pour servir la propagande nationaliste : On peut lire dans les archives : "Ces juifs et ces étrangers, n’ont pas de patrie. Ils veulent l’avènement du communisme international et enlever aux nations leur raison de vivre …"
Vingt-trois Résistants seront fusillés au mont Valérien. La presse collaboratrice souligne "les visages de ces brutes ne montre aucune émotion, Alfonso a un oeil mauvais, Boczor est un individu visqueux au visage de Chouette… Les juifs ont des regards haineux."
Pour Mélinée Manouchian, l’Affiche rouge a pour fonction essentielle d’être un objet de mémoire "Personne n’aurait parlé de Manouchian, de Boczov, de Rajman, d’Alfonso…" Aragon en a fait un poème chanté par Léo Ferré.
En mars 1944, le Mouvement National contre le racisme – qui deviendra plus tard : le MRAP crée par la section juive- publie un tract "La France est fière, que malgré Vichy, des étrangers reconnaissant à la France de les avoir recueilli, ont manifesté jusqu’au sacrifice leur appartenance à leur patrie d’adoption." Ce rapport quasi religieux à la nation Française est manifeste dans les dernières lettres écrites par les condamnés. Manouchian "Je meurs en soldat de l’armée Française de libération (…) Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la liberté et de la paix de demain (…) je n’ai aucune haine contre le peuple allemand .." Alfonso "Je meurs pour la France ; Cloarec "j’ai fait mon devoir de soldat …" Fingercweig : "Si mes parents ont le bonheur de revenir vivants, vous leur direz que je suis mort en brave."
L’idéal du moi au sens de l’honneur et du courage pour la cause qu’ils défendent, l’emporte sur la peur de mourir.
Ils se présentent au seuil de la mort comme des combattants d’un ordre légitime, comme Antigone face à Créon.
Manouchian (10) en 1935 avait écrit : "J’ai soif de science, d’art, de vie, ma sensibilité s’émousse au contact des petitesses de la vie quotidienne et des obligations inutiles qui jalonnent les jours…". La résistance lui offre de vivre avec intensité.
Vivre l’intensité de l’instant selon Nietzsche est une émotion esthétique pour le poète ou l’artiste. Le militant est aussi un maître, au sens de Hegel, il risque sa vie. S’affirmer comme une conscience en combattant héroïquement s’est s’affirmer contre le mépris et l’humiliation des Nazis qui les considéraient comme des sous-hommes.
Aron Skrobek adresse un dernier message à sa famille par l’intermédiaire d’un camarade avant son assassinat au camp de Natzweiler-Struthof en juillet 1943 "Dis-leur que je suis mort courageusement en toute lucidité avec la pleine conscience d’avoir accompli mon devoir, profondément confiant en la victoire et en un avenir meilleur. Ma dernière volonté à l’intention de mon fils est qu’il continue mon combat et qu’il me venge des barbares fascistes…" (Aron S. ignore que son fils est déjà dans la Résistance.) Ce message insiste sur la confiance dans l’avenir et la croyance dans le progrès de la société, fondement de l’idéologie socialiste.
La zone sud :
La Résistance est intense dans le Sud depuis l’installation du gouvernement à Vichy. Les Allemands envahissent en masse le Sud en 1943.
Des étrangers résistants de la zone Nord sont passés en zone Sud en 1943 (comme A. Rayski pour intensifier la lutte en créant de nouvelles organisations issues de la branche juive de la M-O-I). Les résistants y sont nombreux depuis 1940 en particulier les Italiens, les Républicains espagnols, mais aussi des hongrois, des Grecs, des Bulgares, des Allemands…. A Lyon, Grenoble, Toulouse, Avignon, Marseille se reconstitue la M-O-I (avec des jeunes issus de l’U-J-J, puis des combattants d’autres origines) et les F-T-P de la M-O-I (avec les combattants étrangers de tous les pays Européens). Les Organisations ont pour nom "Carmagnole" à Lyon et "Liberté" à Grenoble. En 1943, les F-T-P agissent dans les maquis du Massif Centrale, du Vercors et en Provence. Au côté de la NAÏE PRESS, un autre journal est publié par l’Union de la Jeunesse Juive : Jeune Combat, dont les articles ont fait l’objet d’un recueil récent.
Conclusion
Le travail de mémoire et les ouvrages d’historiens à partir des années 1990 sur la Résistance des étrangers et des juifs ont permis de reconnaître l’existence de leur combat. Le combat de ces étrangers, souvent restés anonymes. Dans Le Sang des étrangers, ouvrage collectif, on peut lire "occulter les différences, induites par les immigrés et les juifs étaient indispensables à la construction du mythe garant de l’unité nationale. Les deux mémoires dominantes, gaulliste et communiste ont convergé pour transmettre l’image d’un peuple français unanimement résistant, l’un guidé par un chef charismatique, l’autre par le parti d’avant garde."
Certains communistes étrangers, parmi les dirigeants, sont retournés après la guerre, dans leurs pays d’origine, dans les partis communistes "frères". (Cela explique aussi le silence autour de cette mémoire.) Ce fut le cas notamment de Gronowski et d’Adam Rayski en Pologne, de Boris Holban en Roumanie, d’Arthur London en Tchécoslovaquie.
Concluons avec René Char, puis G.Picot "Il est bien que la ruse côtoie l’innocence (…). Ces mots paraissent appropriés à la M-O-I. La ruse pour affronter la barbarie, l’innocence pour croire à des lendemains qui chantent pour lesquelles ils ont risqué leur vie."
"J’aime ces êtres tellement épris de ce que leur coeur imagine la liberté, qu’ils s’immolent pour éviter au peu de liberté de mourir." (11)
Grégoire Georges Picot (12) "Toi, l’étranger, tu nous as appris la France dans la naissance de ton refus (…) Le collaborateur te voulait la lie de la terre et tu fus le tannin de notre dignité, toi, l’Italien, le Juif, le Polonais, le Roumain, l’Espagnol, l’arménien, l’Allemand, tu reviens de la mort avec ta solitude. Vous entrez enfin dans notre livre de l’Histoire".
Bibliographie
Notes :
(1) Introduction : Les éléments de parcours de vie et le détail d’organisations rapportés ici concernent surtout Paris, où j’ai pu avoir accès à des documents et conduit quelques entretiens avec des personnes entrées dans la Résistance à 16-17 ans .
(2) L’entretien avec Holban par un journaliste a été enregistré en vidéo (Mémorial de la Shoah)
(3) Marc Bloch, historien, auteur de l’étrange défaite. Résistant, il a été fusillé par la Gestapo en 1944.
(4) En entretien .
(5) Joseph Epstein dirige le F-T-P Français. Il sera fait prisonnier par la gestapo au moment du rendez-vous avec Manouchian (Voir Affiche Rouge)
(6) Entretien avec Max Weinstein.
(7) Paulette Sliwka me raconte comment la solidarité portée par les communistes de tous les pays d’Europe dans le camps a contribué au maintient de l’espoir pour aider les détenues à survivre.
(8) En particulier A.Wiviorka dans son ouvrage : ils étaient juifs, communistes, résistants.
(9) V. enregistrement vidéo, déjà cité.
(10) Manouchian, poète Arménien, a fuit la Turquie pour s’installer en France.
(11) R.Char, Feuillets d’Hypnos, 1943-1944
(12) G.Picot, L’innocence et la ruse, Ed. Tirésias