Comme nous l’évoquions ci-dessus la querelle des DSM dépasse le DSM, même si elle reste focalisée aujourd’hui sur le cinquième du nom.
Dans notre texte (I. 3. Il faut en finir avec les DSM comme référence clinique ! Quant à la suite…) et dans les débats, nous mentionnons les conférences de l’INH, par exemple celle de Thomas Insel, Directeur du célèbre et influent NIMH (National Institue for Mental Health) du 16 avril 2013. Selon lui et d’autres de ses collègues la classification DSM (pour quel usage ?…) est dépassée ; bientôt va venir une classification basée sur la neuro imagerie et la génétique, ce qui invalidera les critères du DSM. Là encore il faut insister sur le fait que cette classification à venir sera d’abord « clinique », et secondairement mais de façon concomitante elle « fera » classification internationale pour les instances sanitaires. Tout le monde y trouvera son compte puisque, autre « bénéfice », elle sera dite « scientifique ». Les lésions cérébrales seraient universelles… La concordance avec la pratique, celle du langage, humaine dans ce champ, s’il en est, reste à surveiller… Problème quelque peu délaissé : comment la psychiatrie sera-t-elle enseignée ; nous disons bien la psychiatrie…
Car le scandale est bien que ce Manuel Diagnostic et Statistique ait servi ces nombreuses dernières années à « former » – formater les étudiants en psychiatrie. Passons ici sur les conséquences, il y faudrait un autre long articles et des combats.
Ainsi des classifications internationales, made in USA, sont devenues le Manuel, le Traité de la Clinique Psychiatrique !
Ainsi il s’agit non seulement de maintenir le vif, le vivant de la clinique européenne « Classique » (Jean Garrabé rappelle dans un texte que le DSM II se calquait sur cette dernière), mais il s’agit aussi d’imposer celle-ci dans les classifications internationales, en rapport évidemment avec celles déjà existantes.
Pour le sérieux et l’invention, la dynamique de travail, nous nous appuierons sur les travaux, passés et actuels de Jean Garrabé (voir ci-dessous). En effet Jean Garrabé participe aux rencontres de STOP DSM, établit la suite et l’extension, ceci en accord avec le regretté Professeur Misès, de la Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfant et de l’Adolescent (CFTMEA R-12) aux adultes et aux personnes âgées. Et nous rappellerons également l’excellent Dictionnaire taxinomique de psychiatrie (1989 déjà !), dans lequel il tente de « donner les appellations en français et dans d’autres langues scientifiques de la psychiatrie, l’anglais, l’allemand, l’espagnol, de notions ou d’entités qui figuraient soit dans la CIM 9, soit dans le projet de révision CIM 10, le DSM III, le DSM III-R car il y a aussi un problème philologique, les signifiants changeant selon les langues ou au fil du temps » (propos de l’auteur).
Rappelons que c’est dès 1984 et 1987 que Roger Misès et Théophile Kammerer annonçaient ce travail pour l’enfant et l’adolescent, travail en réflexions avec les classifications existantes. Misès et Jeammet dans le numéro 24 des Confrontations Psychiatriques remarquaient que les deux démarches, celle de la CIM 9 et celle du DSM III étaient radicalement différentes.
Ainsi à l’heure actuelle au moins deux groupes travaillent à une classification internationale française des maladies mentales, le groupe qui a poursuivi la CFTMEA R-2012 de Misès a déjà établi en comparaison avec la CIM 10 des avancées (par exemple le texte de Douville et Wintrebert – Projet de CFTMA. A propos de la\ » dépression névrotique\ ».).
Nous donnons ici la bibliographie récente de Jean Garrabé, laquelle par son sérieux historique et la modération d’un jugement toutefois très engagé est fort indicative.
1. Garrabé, J. ; a) Dictionnaire taxinomique de psychiatrie, Paris, Masson, 1989.
b) Diccionario taxinómico de psiquiatrica, Mexico, Fondo de Cultura Económica, 1993.
2. Garrabé, J. ; Spécificités historiques des principes classificatoires en psychiatrie ; Psychiatrie Française, Vol. XXXXIII 4/12 Mai 2013 ; Les classifications, un choix conceptuel ? pp. 83-94.
3. Garrabé, J. ; La classification française des troubles mentaux et la Classification internationale des maladies : historique comparatif. L’information Psychiatrique Vol. 89, N° 4 – Avril 2013. Pp. 319-326.
Mentionnons dans ce même numéro, pp 295-302 :
4. Demazeux, S. ; L’échec du DSM-5, ou la victoire du principe de conservatisme.