Freud n’avait pas prévu cette modalité de défense (contre la castration, s’il faut le préciser), le con-sens, aujourd’hui à la mode.
Celui-ci permet déjà, en tous cas, de mieux comprendre ce que nous entendons par bon-sens et non-sens.
Le bon-sens est le pacte qui réunit les interlocuteurs autour d’une possible jouissance commune, qu’ils soient pour ou contre : la jouissance phallique. Chacun s’accorde sur le signifié, libidinal comme l’a montré Freud.
Dans ce contexte, le non-sens est la contestation exercée par le sujet inconscient au nom de la jouissance qui lui est singulière, de son fantasme.
Le non-sens apparaît ainsi moins comme une défense contre la jouissance sexuelle qu’une tentative de la privatiser, de séduire perversement l’autre.
Le con-sens est différent.
Il se manifeste dans le dialogue en récusant le partage de la jouissance, à l’écart donc de tout discours. À ce titre il affirme exclusivement l’arbitraire de l’énonciateur, le seul partage possible étant celui qu’il a de ce trait avec ceux de sa communauté ce qui, reconnaissons-le, est plutôt con.
Grâce au con-sens, nous saisissons ce qui serait être étranger les uns aux autres : pas de jouissance à partager, la seule, narcissique, étant exclusive aux membres de la communauté.
Le con-sens, quoique non décrit, a pu longtemps être une réponse de l’hystérie féminine à l’injonction masculine, renvoyée dès lors à l’impuissance.
Il est frappant qu’il soit devenu un mode banal d’expression dans notre tohu-bohu social. Mais il est vrai que le con-sens est typiquement celui du langage de la science ; la consensualité scientifique ne repose que sur la jouissance narcissique de ceux dont l’arbitraire dirait ce qu’est aujourd’hui le droit.